02 mars 2006

Divagations groenlandaises III

À la suite d’incessantes péripéties, mon pédalo atterrit au Wyoming.

Je me félicitai laconiquement de mon excellent sens de l’orientation, bien que je craignisse un instant que ce don prodigieux ne fût pas suffisant pour réussir ma mission floue. Je fis donc ce que les films d’actions m’avaient appris : avancer en fronçant les sourcils. Puis, j’attachai mon pédalo au poteau que je ne vous ai pas décrit et lui laissai du foin pour le tenir occupé jusqu’à mon retour.

Les habitants du Wyoming sont des gens tout à fait charmants aux yeux de quiconque sait apprécier les mâcheurs de tabac aigris qui aiment chevaucher du bétail qui dégage souvent un parfum plus doux que celui de leur cavalier. (Quand le préjugé dit bonjour aux montagnes.) J’avançais donc sur cette voie pavée de bonnes intentions et de terre battue, lorsque surgit devant moi un centre de curling. C’était un signe. La cathédrale du culte du balayage sur glace se hissait devant moi, telle une vertigineuse et douteuse invitation au plaisir des sens.

Puis, tout d’un coup (de manière très soudaine, vraiment), une pluie de sauterelles tomba du ciel (les grenouilles étant en rupture de stock depuis le film Magnolia). Les critiques de cinéma les plus téméraires s’extasièrent en chœur et y décelèrent des signes que personne n’aurait osé offrir lors de la séance de remue-méninges. C’est ainsi que je fis le lien entre George (oui, oui, l’infâme) et ce temple de l’anéantissement de la société des loisirs. Plusieurs n’y virent que du feu. Mais moi, dans ma grande perspicacité, je savais bien qu’il s’agissait de sauterelles, pas de feu.

À la suite d’un interrogatoire inusité, une sauterelle m’avoua tout. Je l’intimai vertement de cesser de me parler de sa consommation de cocaïne et des bonbons qu’elle avait volés au dépanneur dans son enfance. Un clin d’œil complice plus tard, elle obtempéra et me confirma l’odieux jeu auquel se livrait son maître.

- Twister!
- Oh! m’exclamai-je bruyamment, sans voix. (Beaucoup de pratique.)

Il fallait l’en empêcher au plus vite, et m’acquitter d’une mission que personne ne soupçonnait.

Le moyen le plus logique de m’y rendre (vous devinez que c’est au Groenland?) était d’acheter un vieux sous-marin non hermétique. Quelle chance! J’étais devant un concessionnaire dont la platitude de l’annonce télévisuelle m’avait convaincu.

Une musique de film dont je ne pouvais pas payer les droits commença à jouer.

(Vous ne comprenez pas? Bah! Vous pouvez toujours lire l’épisode précédant...)

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