26 octobre 2010

Appartement 4

Notre appartement était comme les autres. Même tapis gris sale, mêmes murs blanchâtres. En prime, nous avions eu droit à un mur avec petits amas de stuc baveux et fausses demi-briques blanches dans le salon et à un peu de moisissures dans la salle de bains. Quand nous parlions de la moisissure au propriétaire, il lui arrivait de passer, quelques semaines plus tard, après avoir ronchonné; il donnait alors une petite couche de peinture blanche par-dessus.

Puis il y eut la fois où j’ai senti la céramique du mur céder derrière moi dans le bain-douche. Mon poids n’a certainement pas l’habitude d’être une menace pour le carrelage, mais là, après un petit moment de surprise, je sentais bien le petit courant d’air sur ma fesse nue et les quelques morceaux de céramique entre mes orteils.

On a appelé le propriétaire, il a grognonné puis est finalement venu réparer. Réparer signifiait bien sûr réinstaller les carreaux cassés sur le mur. On n’a plus jamais touché aucun mur de l’appartement.

Mais je me dis que ça aurait pu être pire; j’aurais pu traversé une cloison et aboutir dans l’appartement de Mme Robitaille, cheveux épars, chair nue.

En surprime, on a appris qu’il y avait eu un meurtre dans l’appartement. On avait évité le sujet, on s’était dit que c’était peut-être arrivé dans le salon, à cause de la petite tache plus foncée que j’avais remarquée sur le tapis, à l’endroit qu’on évitait de regarder. Mais un jour, Mme Robitaille entreprit de raconter à ma blonde où c’était arrivé, très exactement dans la chambre à coucher, dans le coin, et de dire comment et avec quoi la femme… Ma blonde l’a interrompue. Bon, merci Mme Robitaille, ça va aller comme ça.

Ainsi, on ne sait presque pas que nous avons dormi toutes ces nuits exactement sur les lieux d’un drame conjugal.

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