24 novembre 2010

Appartement 6

Au-dessus de nous, il y avait beaucoup de va-et-vient, une jeune femme blanche, une dizaine d’individus que Claude Poirier n’hésiterait pas à qualifier de louches et de race noire, de la musique forte qui ne passerait jamais à Cité Rock-Détente… et notre plafond qui vibrait régulièrement sous des impulsions rythmiques qui lui faisaient frôler la résonance, lui donnant des airs du Tacoma Narrow Bridge juste avant qu’il s’écroule. On aurait pu croire à du basket-ball, n’eussent été les cris et gémissements qu’on réserve habituellement à une autre sorte d’activité (non, pas le bowling, vous avez une deuxième chance).

La fille aux yeux pochés (sûrement à cause des heures supplémentaires) s’astreignait à une mode très minimaliste qui exigeait en tout temps que le moins de peau possible soit couverte. Ses tenues de prédilection se résumaient à deux bandeaux de tissus portés aux endroits qu’on pourrait qualifier de stratégiques.

Mme Robitaille, qui heureusement n’était pas une adepte de cette mode, avait peur que la fille attrape un rhume (personnellement, j’aurais plutôt misé sur une gonorrhée ou un fœtus alcoolisé). Elle a attendu de la croiser dans l’escalier et lui a offert ses vieux t-shirts, pour ne pas prendre froid. La fille, étonnamment, a refusé.

Un jour, un fourgon cellulaire s’est garé devant le bloc, puis les policiers ont entrepris de le remplir vite fait. Deux, quatre, sept, neuf… Il devait y avoir du monde dans le moindre recoin. Tout le monde les mains dans le dos, et hop! dans le panier à salade.

Un peu après, le vieux monsieur engagé pour nettoyer l’appartement 6 pestait, racontait à qui voulait l’entendre, et inutile de mentionner que Mme Robitaille voulait l’entendre, qu’il avait déjà vu des fosses septiques plus propres. Je ne sais plus trop comment il est venu à bout de la tâche, il a peut-être fait bouillir l’appartement dans le Purell pendant dix minutes.

10-4.

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