Par une étrange pensée qui traversa furtivement ton esprit, tu réalisas que si tu peux retrouver chaque ligne du Notre Père correctement (soit sans trop trébucher), tu ne saurais réciter le Je vous salue Marie avec exactitude, puis que pour Le credo, c’est peine perdue, les bribes sont bien pâles et tout emmêlées (mais furent-elles déjà claires et ordonnées?).
Tu les appris jadis sans trop y penser, sinon tu aurais été bien embêté de dire si Dieu était finalement aux cieux ou à la boulangerie. Puis bon, la plupart du temps, tu prenais des céréales, alors le pain quotidien, ce ne sera pas nécessaire, merci. Quant au fruit des entrailles, tu te rappelles avec flou les efforts du professeur pour s’en sortir élégamment devant une classe incompréhensive. Enfin, tu trouves encore qu’il y avait quelque chose de curieux pour un bonhomme de sept ans de demander à un étranger qui a un condominium infini dans les nuages, des cathédrales dorées partout sur la planète, et qui en plus s’offre le don d’ubiquité, de ne pas le soumettre à la tentation, et pas seulement ça, mais de le délivrer du mal par-dessus le marché… Disons simplement que tu te questionnais alors bien peu sur le modus operandi du Seigneur et de Ses trésoriers terrestres.
Puis un jour, toute la classe traversa la grande cour de récréation jusqu’à l’église de stuc qui arborait l’affreux style presque moderne des années 1960. Ton opinion sur Dieu n’était peut-être pas très précise, mais sur sa maison, elle était particulièrement tranchée: tu la trouvais bien laide. Et les vitraux dans le plus pur style Dollarama n’aidaient en rien (sans vouloir minorer le talent des artisans chinois). Tu allais pourtant négliger ces détails quelques instants plus tard, après que l’enseignante eut annoncé que le moment était venu de penser à ses péchés, d’écouter monsieur le curé, d’écrire ses péchés sur une petite feuille et d’aller en parler à monsieur le curé tour à tour. L’euphorie, bien sûr. Péché? Et toi qui n’aimais même pas le poisson.
Puis le curé, fin pédagogue, enchaîna possiblement avec deux paraboles et une petite explication digne de l’Évangile en papier sans les lions de carton. Tu te rappelles pourtant l’effroi qui te prit en fixant le petit papier blanc pur sans péché. Il te fallait le souiller d’un péché d’enfant, ridicule par définition bien sûr, mais tu n’avais pas tout à fait le goût de jouer à Vérité ou Conséquence avec le curé et son patron d’en haut. T’étais-tu chicané avec ta sœur pour avoir le verre bleu? Avais-tu mangé un morceau de chocolat en cachette? Avais-tu dit un gros mot à table? Tu regrettas presque de ne pas t’être battu plus tôt, ça t’aurait évité de chercher ainsi.
Tu misas sur la chicane avec ta sœur, possiblement à l’instar de vingt-cinq autres élèves, en plaignant le plus sérieusement du monde les quatre ou cinq qui avaient eu le malheur de naître sans prédécesseurs ou successeurs.
En vieillissant, tu réalisas que les péchés d’adultes ont l’avantage d’être beaucoup plus intéressants et diversifiés, et qu’ils viennent en plusieurs belles catégories avec de délicieuses possibilités d’agencement.
Avarice. Colère. Envie. Gourmandise. Luxure. Orgueil. Paresse.
Le compte des péchés usuels réunis en un forfait sept services; tu as goûté à tout. (Et parfois plusieurs en même temps, sale pécheur.)
Tu les appris jadis sans trop y penser, sinon tu aurais été bien embêté de dire si Dieu était finalement aux cieux ou à la boulangerie. Puis bon, la plupart du temps, tu prenais des céréales, alors le pain quotidien, ce ne sera pas nécessaire, merci. Quant au fruit des entrailles, tu te rappelles avec flou les efforts du professeur pour s’en sortir élégamment devant une classe incompréhensive. Enfin, tu trouves encore qu’il y avait quelque chose de curieux pour un bonhomme de sept ans de demander à un étranger qui a un condominium infini dans les nuages, des cathédrales dorées partout sur la planète, et qui en plus s’offre le don d’ubiquité, de ne pas le soumettre à la tentation, et pas seulement ça, mais de le délivrer du mal par-dessus le marché… Disons simplement que tu te questionnais alors bien peu sur le modus operandi du Seigneur et de Ses trésoriers terrestres.
Puis un jour, toute la classe traversa la grande cour de récréation jusqu’à l’église de stuc qui arborait l’affreux style presque moderne des années 1960. Ton opinion sur Dieu n’était peut-être pas très précise, mais sur sa maison, elle était particulièrement tranchée: tu la trouvais bien laide. Et les vitraux dans le plus pur style Dollarama n’aidaient en rien (sans vouloir minorer le talent des artisans chinois). Tu allais pourtant négliger ces détails quelques instants plus tard, après que l’enseignante eut annoncé que le moment était venu de penser à ses péchés, d’écouter monsieur le curé, d’écrire ses péchés sur une petite feuille et d’aller en parler à monsieur le curé tour à tour. L’euphorie, bien sûr. Péché? Et toi qui n’aimais même pas le poisson.
Puis le curé, fin pédagogue, enchaîna possiblement avec deux paraboles et une petite explication digne de l’Évangile en papier sans les lions de carton. Tu te rappelles pourtant l’effroi qui te prit en fixant le petit papier blanc pur sans péché. Il te fallait le souiller d’un péché d’enfant, ridicule par définition bien sûr, mais tu n’avais pas tout à fait le goût de jouer à Vérité ou Conséquence avec le curé et son patron d’en haut. T’étais-tu chicané avec ta sœur pour avoir le verre bleu? Avais-tu mangé un morceau de chocolat en cachette? Avais-tu dit un gros mot à table? Tu regrettas presque de ne pas t’être battu plus tôt, ça t’aurait évité de chercher ainsi.
Tu misas sur la chicane avec ta sœur, possiblement à l’instar de vingt-cinq autres élèves, en plaignant le plus sérieusement du monde les quatre ou cinq qui avaient eu le malheur de naître sans prédécesseurs ou successeurs.
En vieillissant, tu réalisas que les péchés d’adultes ont l’avantage d’être beaucoup plus intéressants et diversifiés, et qu’ils viennent en plusieurs belles catégories avec de délicieuses possibilités d’agencement.
Avarice. Colère. Envie. Gourmandise. Luxure. Orgueil. Paresse.
Le compte des péchés usuels réunis en un forfait sept services; tu as goûté à tout. (Et parfois plusieurs en même temps, sale pécheur.)
10 commentaires:
Je confesse avoir également toutes les misères du monde à me souvenir des vers de « Je vous salue Marie ». Peut-être est-ce parce qu'il s'agit surtout d'une prière de filles ? J'ai fréquenté une école privée non mixte (ça existait encore), et je ne me souviens pas qu'on m'ait jamais fait réciter cette prière où l'on parle d'entrailles et du fait d'être « pleine de grâces » (kossé ça ?).
Je ne me prononcerai pas ici sur le « look and feel » des églises des années 1950-1960-1970, mais en ce qui concerne les péchés, tu as sans doute vu que Ben-16 nous en a rajouté un cette semaine : pour un chrétien, dépasser une voiture peut-être l'occasion de pécher (pas mortellement, mais tout de même).
Prière de filles? Peut-être ici, mais il me semble qu'en Amérique du Sud, c'est beaucoup plus général, faudrait voir. Mais bon, les lobbies féministes peuvent se rassurer et les Fathers for Justice déchirer leur chemise, il existe un Je vous salue Joseph qui semble ne connaître aucun succès… http://fr.wikipedia.org/wiki/Je_vous_salue_Joseph
Pour le nouveau péché, ça s’inscrit bien dans la famille des 7. Un peu d’orgueil pour montrer la puissance de son bolide, de l’envie de dépasser l’autre : le péché y est. Mais bon, c'est sûr que l’abolition des limbes a un prix…
À cet âge, je faisais partie du groupe des quatre ou cinq enfants uniques. Je ne me rappelle pas si j'avais peur de la colère de Dieu, mais j'avais suffisamment peur de celle ma mère pour ne jamais oser m'éloigner du droit chemin.
Sur mon bout de papier blanc, j'avais donc dû inventer une histoire de toutes pièces. À sept ans, j'ai préféré pécher en mentant au curé que de passer pour une menteuse en affirmant ce que je considérait être la vérité.
Aujourd'hui, je réalise que c'est la faute à la religion si je suis devenue une pécheresse de haut calibre...
Oui, j'avais également ce genre de parents dont le châtiment me paraissait beaucoup plus direct... Bref, moi aussi ma chicane avec ma soeur, je l'avais un peu scénarisée exprès pour le curé.
Oui, comme il est bon de pouvoir mettre la faute sur quelque chose d'aussi vaste pour nos péchés actuels!
Moi je faisais partie des 4 ou 5 de toute mon école primaire exemptés du cours de religion. Bon, de ces 4 ou 5, y avait ma soeur, y en avait un qui y était parce que protestant et deux anglos qui devaient apprendre le français plus vite que la prière, question pratique (et temporaire).
Bref, je n'ai jamais été à la confesse et je n'ai jamais appris le ni le Notre père ni le Je vous salue Marie (qui pour nous était pleine de graisse).
Ça a l'avantage que je péche probablement autant que tout le monde, mais je ne m'en rend pas compte...
La culpabilité? C'est quoi ça la culpabilité?. ;-)
Tiens, parlant de religion chez les enfants, je viens de voir le documentaire Jesus Camp. Une vraie petite merveille de film à voir absolument.
Praise the Lord!
(Ischhh...)
Pascale, tu en parles et je réalise que j'avais pratiquement oublié qu'il y avait un témoin de Jéhovah dans ma classe. Ça, sans doute, on trouvait ça encore pire que tout le reste, pas d'Halloween, de Noël et de chocolat de Pâques... on se demandait vraiment c'était quoi, lui, ses péchés! Je peux aussi annoncer que Marie pleine de graisse fut également le calembour de l'année dans ma classe; un bon gag intemporel, il faut croire.
Galad, merci, ça m'avait intrigué lorsque j'en avais entendu parler, mais bon, pas vu encore... Je vais me fier sur ton jugement, alors gare à toi si je le loue et que c'est mauvais!
Not a chance!
Je te suggère de regarder aussi les deleted scenes. Presqu'un autre docu en soi. On y voit encore plus le parallèle avec la politique de l'oncle Bush.
Tu m'en donneras des nouvelles...
Euh...mais je ne suis pas témoin de Jéhovah moi là quand même...
Et celui de ta classe, fallait-il qu'il fasse pareil comme les autres, la confesse, les prières et tout le tralala ou bien il se trouvait exempté, le chanceux?
Galad, c’est bon, je le jure sur la Bible, tiens… Et d’accord pour Bush, je verrai, je ne suis pas un partisan des complots prêts-à-porter, mais pour lui, je suis plein de péchés de mauvaise intention.
Pascale, ha! j’avais pourtant cru… Alors tes lunettes de soleil, ce n’est pas pour te protéger du buisson ardent? Bon, d’accord. En fait, pour le jeune ami de Jéhovah, je crois qu’il avait échappé à la confesse avec le curé, mais qu’il avait dû apprendre les prières, des poèmes comme les autres, non? Ah tiens, non? Et il se reprenait souvent pour la confesse chez la directrice, si je me souviens bien.
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