Mardi, j’empruntai les voies congestionnées des autoroutes montréalaises jusqu’au centre-ville. Je me livrai ensuite à une recherche enflammée de stationnement pour mon vieux cheval à panneaux de polymère ou d’aluminium. Tel un mercenaire, je tournais autour de ma cible, l’œil aguerri. Je jouai du clignotant et finis par trouver un charmant emplacement (à 5 intersections de ma destination), et je pus enfin laisser reposer ma vaillante bête.
C’était mon deux minutes et quart de gloire : je récoltai mon coffret DVD du Cœur a ses raisons, et m’attirai l’envie admirative de la sympathique réceptionniste. Un grand moment dans l’histoire de la réclamation de prix. Je le glissai dans la poche intérieure de mon manteau et sortis affronter l’hiver avec un petit h. (Je me sens comme un Français : j’ai le goût de me plaindre de dix degrés Celsius qui passent sous la barre du 0!)
Ma boussole interne et des indications externes guidèrent ensuite souverainement mes pas vers le Complexe Desjardins, lieu fréquenté pour la dernière fois à une époque qui me permettait de croire que ce lieu si lointain ne pouvait être que la réelle résidence du vrai père Noël, d’autant plus que c’était ce que mes parents m’avaient confirmé. Mes parents étaient des menteurs; je le compris au moment où le vrai père Noël fut remplacé par un autre vrai père Noël (sinistre), ce qui aiguisa mon agile et juvénile sens du discernement. L’année suivante, mon esprit rigoureux et logique ne pouvait tolérer que ma sœur continuât de vivre dans une naïveté entretenue; je tuai le mythe en lui faisant la saisissante démonstration que les cadeaux étaient déjà achetés et qu’ils étaient entreposés au fond d’une garde-robe. La preuve fit son effet, le mythe succomba, et mon don de lucidité m’est encore reproché annuellement, lorsque Noël approche et que les souvenirs sont ressassés.
Aujourd’hui, je comprends encore mieux que le père Noël est une image de marque, un Américain obèse (pléonasme?), qui boit du Coca-Cola, et qui cherche à supplanter Jésus dans la course à la chefferie de la nouvelle religion sociale. Et il gagne aisément, sa campagne de financement étant hautement impressionnante. Mais, bon, les enfants ont droit à leur moment d’innocence. Continuons donc de les duper! Bref, toujours est-il que la vue des escaliers mobiles du Complexe Desjardins, dans ce décor, éveillait d’intéressants souvenirs.
Je finis par trouver le magasin de ma quête commerciale. En entrant, les machines grises détectèrent probablement mon coffret DVD emmitouflé car un son peu invitant retentit dans le magasin. Ma réaction de surprise (Actor’s studio) fut sans doute impressionnante, et les employés aux caisses me firent comprendre de ne pas porter attention au son. J’avançai donc dans le magasin, conscient que le DVD allait probablement refaire sonner l’alarme à la sortie, mais je me voyais mal aller voir la caissière en lui expliquant que j’avais un DVD neuf sur moi, qui ne provenait pas de ce magasin, ni d’un autre. Bref, j’allai chercher le produit recherché, en évitant les tergiversations suspectes. Après avoir zieuter un peu, je m’enquis même de sa disponibilité et de son emplacement, pour accélérer le processus. Pendant ce temps, mon avocat interne se préparait un plaidoyer de béton pour expliquer la présence du DVD « fautif » dans ma poche de manteau. Un employé me fit faire quelques détours dans le magasin et dénicha le produit sollicité dans une nouvelle boîte, cachée sous une table de disques qui, eux, auraient pu être cachés… J’allai payer, rapidement. En sortant du magasin, les cloches électroniques fatigantes retentirent en effet. Une dame âgée, le dos courbé, avec sa canne dans la main (Vive le vent, vive le vent – décidément la police prend des mesures insoupçonnées et les déguisements de ses agents secrets sont très habiles) m’indiqua la caissière du doigt à coups de « Monsieur! Monsieur! ». Évidemment, je m’étais retourné dans la même seconde, prêt à témoigner en cour, à inviter à la barre la réceptionniste qui m’avait remis le prix. La caissière dut juger de ma transparence instantanément, puisqu’elle fit fi de la sonnerie et hocha simplement la tête pour me signaler que tout était correct.
Peut-être aurais-je du succès dans une carrière de voleur à l’étalage, mais je m’abstiens. Le simple fait de croire qu’on pourrait croire que j’avais volé quelque chose que je n’avais pas volé me rendait mal à l’aise. Le poste n’est pas pour moi.
C’était mon deux minutes et quart de gloire : je récoltai mon coffret DVD du Cœur a ses raisons, et m’attirai l’envie admirative de la sympathique réceptionniste. Un grand moment dans l’histoire de la réclamation de prix. Je le glissai dans la poche intérieure de mon manteau et sortis affronter l’hiver avec un petit h. (Je me sens comme un Français : j’ai le goût de me plaindre de dix degrés Celsius qui passent sous la barre du 0!)
Ma boussole interne et des indications externes guidèrent ensuite souverainement mes pas vers le Complexe Desjardins, lieu fréquenté pour la dernière fois à une époque qui me permettait de croire que ce lieu si lointain ne pouvait être que la réelle résidence du vrai père Noël, d’autant plus que c’était ce que mes parents m’avaient confirmé. Mes parents étaient des menteurs; je le compris au moment où le vrai père Noël fut remplacé par un autre vrai père Noël (sinistre), ce qui aiguisa mon agile et juvénile sens du discernement. L’année suivante, mon esprit rigoureux et logique ne pouvait tolérer que ma sœur continuât de vivre dans une naïveté entretenue; je tuai le mythe en lui faisant la saisissante démonstration que les cadeaux étaient déjà achetés et qu’ils étaient entreposés au fond d’une garde-robe. La preuve fit son effet, le mythe succomba, et mon don de lucidité m’est encore reproché annuellement, lorsque Noël approche et que les souvenirs sont ressassés.
Aujourd’hui, je comprends encore mieux que le père Noël est une image de marque, un Américain obèse (pléonasme?), qui boit du Coca-Cola, et qui cherche à supplanter Jésus dans la course à la chefferie de la nouvelle religion sociale. Et il gagne aisément, sa campagne de financement étant hautement impressionnante. Mais, bon, les enfants ont droit à leur moment d’innocence. Continuons donc de les duper! Bref, toujours est-il que la vue des escaliers mobiles du Complexe Desjardins, dans ce décor, éveillait d’intéressants souvenirs.
Je finis par trouver le magasin de ma quête commerciale. En entrant, les machines grises détectèrent probablement mon coffret DVD emmitouflé car un son peu invitant retentit dans le magasin. Ma réaction de surprise (Actor’s studio) fut sans doute impressionnante, et les employés aux caisses me firent comprendre de ne pas porter attention au son. J’avançai donc dans le magasin, conscient que le DVD allait probablement refaire sonner l’alarme à la sortie, mais je me voyais mal aller voir la caissière en lui expliquant que j’avais un DVD neuf sur moi, qui ne provenait pas de ce magasin, ni d’un autre. Bref, j’allai chercher le produit recherché, en évitant les tergiversations suspectes. Après avoir zieuter un peu, je m’enquis même de sa disponibilité et de son emplacement, pour accélérer le processus. Pendant ce temps, mon avocat interne se préparait un plaidoyer de béton pour expliquer la présence du DVD « fautif » dans ma poche de manteau. Un employé me fit faire quelques détours dans le magasin et dénicha le produit sollicité dans une nouvelle boîte, cachée sous une table de disques qui, eux, auraient pu être cachés… J’allai payer, rapidement. En sortant du magasin, les cloches électroniques fatigantes retentirent en effet. Une dame âgée, le dos courbé, avec sa canne dans la main (Vive le vent, vive le vent – décidément la police prend des mesures insoupçonnées et les déguisements de ses agents secrets sont très habiles) m’indiqua la caissière du doigt à coups de « Monsieur! Monsieur! ». Évidemment, je m’étais retourné dans la même seconde, prêt à témoigner en cour, à inviter à la barre la réceptionniste qui m’avait remis le prix. La caissière dut juger de ma transparence instantanément, puisqu’elle fit fi de la sonnerie et hocha simplement la tête pour me signaler que tout était correct.
Peut-être aurais-je du succès dans une carrière de voleur à l’étalage, mais je m’abstiens. Le simple fait de croire qu’on pourrait croire que j’avais volé quelque chose que je n’avais pas volé me rendait mal à l’aise. Le poste n’est pas pour moi.
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